Rien ne me prédestinait à devenir shaper...

Au début des années 80, j'avais 20 ans, mes passions m'amenaient du côté de l'escalade de haut niveau et du ski.

Je voyais ma vie comme ça, il ne me venait pas à l'idée qu'un jour, il me faudrait travailler !

En 1981, sous prétexte d'études à l'IUT d'Aix-en-Provence, j'ai fui la région lyonnaise pour filer vers le sud, le soleil et la Montagne Sainte-Victoire.

Sur ses falaises je passais le plus clair de mon temps.

J'y ai rencontré Bruno Gouvy, qui partageait ces mêmes passions et nous sommes rapidement devenus inséparables, intimement liés par les mêmes excès: C'est en effet quotidiennement que la vie était mise dans la balance.

Notre amitié a tourné au délire fusionnel et notre duo s'est fait connaitre comme "Farigoulette Connection".

 

 

François : solo dans "6ème métatarsien"

En monoski, avec les tout premiers Duret "Pierre Poncet", en costume s'il vous plait !


Bruno dans "OVNI"
 
En 1983, nous avons tenté d'ouvrir une voie nouvelle dans la face nord des Droites, dans le massif du Mont-Blanc...

 
 


 
 

Après un premier tiers éprouvant dans une barre rocheuse, nous nous sommes engagés dans une goulotte de glace très raide, c'est alors que 400 m en dessus s'est produit une énorme avalanche de pierres, nous étions juste dans sa trajectoire...

Après avoir pris tant de risques en faisant abstraction de ce genre d'éventualités, j'ai su que j'allais mourir...

... et nous sommes passés à travers l'un et l'autre !
Bruno aurait continué, comme si de rien n'était, moi, je n'ai pas pu, j'avais peur et je ne savais plus si j'étais vivant ou mort...

Nous nous sommes échappés de cette goulotte pour trouver un abri, bivouac, orage, foudre pas loin. Le lendemain à l'aube, trempés et gelés, nous sommes redescendus en rappel et l'hélico est venu s'assurer que nous n'avions pas besoin de secours. Nous étions en pleine paroi, le pilote était à 10 m, un infini nous séparait.

Je n'ai plus jamais grimpé ensuite.

Je voulais connaître d'autres âges de la vie, avoir des enfants, vieillir.

Pratiquement tous ceux que j'ai côtoyés à l'époque sont morts prématurément.

 

Un mois plus tard, je suis parti au service militaire dans la Marne, un voyage par un train de nuit spécial "bidasses", qui nous a laissé en pleine cambrousse, un camion nous attendait.

Je me suis "suicidé" une heure après mon arrivée dans le camp de Suippes, transféré à l'infirmerie, gendarmes, puis à l'hôpital militaire de Nancy, où j'ai été réformé P5 après avoir raconté mille bêtises avec conviction.

Tout cela m'a demandé un engagement très fort.

À mon retour, j'étais complètement perturbé par ces deux épisodes successifs : l'acceptation de la mort imminente, puis le simulacre de suicide. Je ne savais plus du tout quel sens donner à mon existence.

Un jour, à la plage, j'ai suivi fasciné les évolutions dans les vagues d'un des premiers windsurfers doté d'un "sinker", on disait "waterstart" à l'époque.

Lorsqu'il est sorti de l'eau, je suis allé voir l'objet et ma décision a été prise en un instant : je devais concevoir ce genre de choses, m'en servir peut-être, mais avant tout les fabriquer ! C'est à ce moment-là, je crois, que le sculpteur s'est réveillé en moi.

Par la suite, beaucoup de bruits ont couru sur le fait que je ne savais pas naviguer et c'était vrai ! J'ai créé une entreprise de customs sans jamais être monté dessus.

Mes motivations étaient d'un autre ordre, un peu moins anecdotiques que ce qu'en disait Planche Mag en 1987 !

 

 
 

 

 
 

Avec Bruno, nous avons décidé de créer une manufacture d'engins de glisse, le nom s'est imposé direct : Farigoulette Connection.

Je suis alors retourné à Lyon, pour travailler chez Patrick Mazerot à Sogésurf. J'y ai fait mes premières armes pendant quelques mois, et j'y ai fabriqué mes premières planches.

En juin 1984, Farigoulette a été créée !

 

 
 
 
 

Toute première sortie plage du Jaï sur l'étang de Berre

 

 
 

Les premiers temps ont été durs, se faire connaitre, trouver des clients, négocier sans cesse avec la banque... Nous avons été interdits de chéquier en moins de deux mois...

Bruno n'était presque jamais là, je me suis retrouvé seul à tout assumer.

Nos rapports se sont dégradés, la séparation est devenue inévitable.

Bruno s'est alors lancé dans des défis de plus en plus fous, rendant de plus en plus probable une issue tragique...

 

 
 
 
 

Bruno Gouvy est mort le 15 juin 1990 à l'Aiguille Verte, après une chute de 1000 mètres.

Il avait 27 ans.

 

Biographie

Vidéo "Drus express"

 

 

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